Jour 4 : Les consolations dans la douleur
Mais vous êtes plein de miséricorde, et j’espère en vous, Seigneur, à cause de votre loi.
Des profondeurs de leur tristesse, les pauvres âmes souffrantes laissent échapper vers vous, ô mon Dieu, des éclairs de joie et des sourires de consolations.
Elles sont pardonnées. Elles en ont la certitude ; votre souveraine clémence le leur a dit. Il me semble les entendre, jetant sans cesse par millions de voix, à tous les échos de leur prison, l’exclamation si juste de la bienheureuse Marguerite-Marie :
« Oh, que le purgatoire est doux à qui a mérité mille fois l’enfer ! »
L’enfer, elles en sont préservées, Dieu merci ! La malédiction, le désespoir, l’éternité malheureuse, tout cela ne les regarde point. Mais il s’en est fallu d’un rien pour une multitude d’entre elle, qu’elles n’y fussent englouties, et la parole du roi prophète leur revient sur les lèvres :
« Encore un peu, si le Seigneur n’était venu à mon aide, mon âme eût eu l’enfer pour demeure. » Ps. 93.
Elles ne peuvent sonder par la pensée les abîmes sans fond, entendre ses cris d’horreur, éprouver quelque chose de l’ardeur de ses flammes mais ce n’est que pour un temps, le temps d’apprécier à quel malheur sans remède elles ont échappé.
Quelle joie !
Elles ne peuvent plus vous offenser, ô mon Dieu ! Plus de tentations, plus d’écueils, plus de faiblesse, plus de surprises ; elles ont traversé pour ne plus la reprendre, la mer orageuse de ce monde ; il n’y a plus de naufrage à craindre.
Quelle consolation sera la nôtre si Dieu nous accorde un tel privilège !
Elles sont sûres d’aller au Ciel. Leur trône est prêt là-haut, où Dieu les attend pour les couronner ; rien ne peut jamais plus leur faire perdre le droit acquis à cette infinie récompense.
Pénible est l’attente, mais bien douce est la pensée que cette attente aura une fin, et que le ciel n’en aura pas.
O Cœur Sacré de Jésus, entendez vos chers enfants du purgatoire soupirer après vous. Diminuez, nous vous en conjurons, les tristesses de leur douloureux exil, et, hâtez le jour de leur éternelle délivrance.
Pater, Ave, De profundis.
Jour 5 : L’accent de la résignation
Mon âme s’est appuyée sur votre parole, elle a mis toute sa confiance dans le Seigneur.
Des profondeurs de leur douleur, les âmes souffrantes font arriver jusqu’à vous, ô mon Dieu, les accents de leur plus intime résignation.
Elles méritent, elles le savent bien, toutes les peines qu’elles ont à subir, et elles les subissent dans la soumission la plus docile et la plus calme.
Peine de privation temporaire de la vision béatifique ! Ne plus vous voir de quelque temps après vous avoir vu une première fois dans la rapidité d’un éclair, vous, beauté souveraine, bonté infinie, amour éternel ; vous devant qui s’éclipse tout bien créé ; vous que rien ne remplace, dont le souvenir ne peut plus se perdre ; vous après qui soupirent toutes les puissances de l’âme, comme le cerf altéré soupire après la source d’eau vive ; de toutes leurs souffrances, voilà la plus grande et la plus incompréhensible, défiant toute expression et toute image.
Peine des sens. Le feu et la variété des tourments correspondants et proportionnés à chacune de ces prisonnières selon l’importance, le nombre et la durée de leurs fautes, dépassent à eux seuls tout ce que la souffrance connaît de plus pénible sur cette terre, où nul pourtant qui ne se plaigne de la pesanteur de sa croix.
Et ces peines, elles les acceptent, dans la mesure indiquée par vous, ô mon Dieu, elles reconnaissent la justice du châtiment, elles baisent la main qui le leur inflige, elles bénissent les flammes qui les purifient, adorent votre volonté infiniment sainte, et laissent à la disposition de votre bon plaisir leur cœur contrit et humilié.
Leur obéissance absolue est la seule barrière qui s’impose entre elles et vous. Leurs chaînes seraient-elles brisées et ouvertes les portes de leur cachot, elles resteraient immobiles à leur place, jusqu’au moment précis où votre parole leur dirait de sortir.
Quel spectacle émouvant, aux yeux des anges et des saints, que celui de cette multitude, plus patiente au milieu de ses tourments que les martyrs sur leur bûcher.
Par les mérites de votre agonie au jardin des Oliviers, permettez, ô divin Cœur de Jésus, que nos humbles prières se changent en soulagement pour ces âmes si souffrantes et si résignées.
Pater, Ave, De profundis.