Voici quelques extraits de « L’Apparition de la Très Sainte Vierge sur la montagne de la Salette le 19 septembre 1846 » publiée par la Bergère de la Salette avec l’imprimatur de Mgr l’évêque de Lecce.

« Le 18 septembre, veille de la sainte Apparition de la Sainte Vierge, j’étais seule, comme à mon ordinaire, à garder les quatre vaches de mes maîtres. Vers les 11 heures du matin, je vis venir auprès de moi un petit garçon. À cette vue, je m’effrayai parce qu’il me semblait que tout le monde devait savoir que je fuyais toutes sortes de compagnies.

Cet enfant s’approcha de moi et me dit : « Petite, je viens avec toi, je suis Maximin, je suis de Corps ». À ces paroles, mon mauvais naturel se fit bientôt voir, et, faisant quelques pas en arrière, je lui dis : « Je ne veux personne, je veux rester seule ». Puis, je m’éloignais, mais cet enfant me suivait en me disant : « Va, laisse-moi avec toi, mon maître m’a dit de venir garder mes vaches avec les tiennes ; je suis de Corps ». Moi, je m’éloignai de lui en lui faisant signe que je ne voulais personne ; et après m’être éloignée, je m’assis sur le gazon. Là, je faisais ma conversation avec les petites fleurs du Bon Dieu.

Un moment après, je regarde derrière moi et je trouve Maximin assis tout près de moi. Il me dit aussitôt : « Garde-moi, je serai bien sage ». Mais mon mauvais naturel n’entendit pas raison. Je me relève avec précipitation et je m’enfuis un peu plus loin sans rien lui dire, et je me remis à jouer avec les fleurs du Bon Dieu. Un instant après, Maximin était encore là à me dire qu’il serait bien sage, qu’il ne parlerait pas, qu’il s’ennuierait d’être tout seul, et que son maître l’envoyait auprès de moi, etc… Cette fois, j’en eus pitié, je lui fis signe de s’asseoir, et moi, je continuai avec les petites fleurs du Bon Dieu.

Maximin ne tarda pas à rompre le silence, il se mit à rire, (je crois qu’il se moquait de moi) ; je le regarde et il me dit : « Amusons-nous, faisons un jeu. » Je ne lui répondis rien, car j’étais si ignorante que je ne comprenais rien au jeu avec une autre personne, ayant toujours été seule. Je m’amusais seule avec les fleurs et Maximin, s’approchant tout à fait de moi, ne faisait que rire en me disant que les fleurs n’avaient pas d’oreilles pour m’entendre, et que nous devions jouer ensemble. Mais je n’avais aucune inclination pour le jeu qu’il me disait de faire.

Cependant, je me mis à lui parler et il me dit que les dix jours qu’il devait passer avec son maître allaient bientôt finir, et qu’ensuite il s’en irait à Corps chez son père, etc… Tandis qu’il me parlait, la cloche de la Salette se fit entendre, c’était l’Angelus : je fis signe à Maximin d’élever son âme à Dieu. Il se découvrit la tête et garda un moment le silence.

Ensuite, je lui dis : « Veux-tu dîner ? – Oui, me dit-il. Allons ». Nous nous assîmes ; je sortis de mon sac les provisions que m’avaient données mes maîtres, et selon mon habitude, avant d’entamer mon petit pain rond avec la pointe de mon couteau, je fis une croix sur mon pain, et au milieu un tout petit trou, en disant : « Si le diable y est, qu’il en sorte, et si le Bon Dieu y est, qu’il y reste » et vite, vite, je recouvris le petit trou. Maximin partit d’un grand éclat de rire et donna un coup de pied à mon pain qui s’échappa de mes mains, roula jusqu’au bas de la montagne et se perdit.

J’avais un autre morceau de pain, nous le mangeâmes ensemble ; ensuite nous fîmes un jeu ; puis comprenant que Maximin devait avoir besoin de manger plus, je lui indiquai un endroit de la montagne couvert de petits fruits. Je l’engageai à aller en manger, ce qu’il fit aussitôt ; il en mangea et en rapporta plein son chapeau. Le soir nous descendîmes ensemble de la montagne, et nous nous promîmes de revenir garder nos vaches ensemble. »

(A suivre)