Pontmain, c’est un hameau d’une quinzaine de maisons et de moins de cent habitants, à 50 kms au nord de Laval. En 1870, 38 hommes de Pontmain, sont mobilisés pour la guerre contre la Prusse. Avant leur départ, leur curé qui croit fortement en la protection de la Vierge Marie, les bénit et les consacre à la Sainte Vierge, les assurant qu’ils rentreront tous au pays.

Le 17 janvier 1871,  vers midi et demi, la terre tremble, ce qui impressionne fortement tous les habitants, surtout en cette période troublée. Chacun vit dans l’angoisse et dans la peur car on est sans nouvelles des 38 hommes partis depuis septembre dernier. Et puis il y a une épidémie de typhoïde qui commence à reprendre. Et la variole qui se répand.

Malgré tout, on prie avec ferveur. Car il en est ainsi à Pontmain. Depuis l’arrivée du curé, l’abbé Michel Guérin, dans chaque famille, on prie le chapelet tous les jours, et on se retrouve de bonne heure, chaque matin à la messe.

Ce soir-là, deux enfants, Eugène (12 ans) et Joseph (10 ans) Barbedette aident César, leur père. Eugène sort de la grange pour voir le temps qu’il fait dehors.

Et voilà que, en plein ciel, au-dessus de la maison d’en face, il voit une « Belle Dame » qui tend les bras comme dans un geste d’accueil et qui lui sourit. Elle est vêtue d’une robe bleue semée d’étoiles d’or (comme la voûte de l’église peinte ainsi en 1860). Sur la tête, elle a un voile noir surmonté d’une couronne d’or avec un liseré rouge au milieu. Aux pieds, elle porte des chaussons bleus avec une boucle d’or. Elle est au milieu d’un triangle formé de trois grosses étoiles. L’enfant sourit à la « Belle Dame ». Ce sourire sera le seul dialogue car, de toute l’apparition, la « Belle Dame » ne dira pas un seul mot.

Le jeune frère Joseph, venu à la porte, voit lui aussi la « Belle Dame ». La nouvelle se répand dans le village et plusieurs accourent mais les grandes personnes ne voient rien sinon trois étoiles inhabituelles. Certains jeunes enfants s’extasient car ils voient eux aussi « la Belle Dame ». L’abbé Guérin arrive au milieu de ses paroissiens.

On commence à parler, à discuter et la « Belle Dame » devient triste, comme le dit Eugène. « Prions » ajoute M. le curé, il sort son chapelet. Aussitôt, la Dame sourit à nouveau.

Après le chapelet, tous chantent le Magnificat.  Des lettres commencent alors à s’écrire, en majuscule, couleur d’or, dans le ciel. Le mot MAIS  apparait suivi du mot PRIEZ. Le message continue de s’écrire lettres après lettres. A la fin des litanies que l’on chante après le Magnificat, les enfants peuvent lire une première ligne :

« Mais priez mes enfants, Dieu vous exaucera en peu de temps. »

Puis, des lettres commencent une seconde ligne : MON FILS. Alors c’est un cri de joie général : « C’est Elle ! C’est bien Elle ! C’est la Sainte Vierge ! » Jusque-là, on pensait que ce pouvait être Elle. Mais maintenant, on en est sûr. C’est bien écrit : MON FILS. Pendant que l’on chante le Salve Regina, le message continue :

« Mon fils se laisse toucher »

Il n’y a pas de point final mais cette deuxième ligne est soulignée par un gros trait d’or comme les lettres.  « Chantons notre cantique à Marie » dit alors M. le curé et les paroles s’élèvent joyeuses vers le ciel, alors que le dimanche d’avant, on l’avait chanté la gorge serrée : « Mère de l’Espérance dont le nom est si doux, Protégez notre France. Priez, priez pour nous. »

Suit un autre cantique « Mon doux Jésus ». Les enfants, joyeux jusque-là, deviennent subitement tout tristes. C’est que la Vierge elle aussi est devenue toute triste. Elle ne pleure pas mais un frémissement au coin des lèvres marque l’intensité de sa douleur. « Jamais on n’a vu une pareille tristesse sur un visage humain » disent les enfants. Joseph Barbedette déclarera : « J’ai vu ma mère abîmée dans la douleur lorsque, quelques mois plus tard, mon père fut frappé par la mort. On sait ce qu’un tel spectacle dit au cœur d’un enfant ! et pourtant, je m’en souviens, la tristesse de ma mère ne me parut rien en comparaison de la tristesse de la très sainte Vierge qui me revenait naturellement à l’esprit. C’était bien la Mère de Jésus au pied de la croix de son Fils. »

Un sourire « plus grave » revient sur ses lèvres et une petite croix blanche apparaît sur chacune de ses épaules. Il est 20 H 30.

« Mes chers amis, dit M. le curé, nous allons faire tous ensemble la prière du soir ». Tout le monde se met à genoux, là où il est, certains dans la neige, d’autres dans la grange pour ceux qui ont voulu s’abriter du froid glacial.

« Voyez-vous encore ? » demande M. le curé. « Non, M. le curé, tout a disparu, c’est tout fini ! ». Il est près de 21 H 00. Chacun rentre chez soi, le cœur en paix. Toute crainte, toute peur s’en est allée.

Les Prussiens qui devaient prendre Laval ce soir-là n’y sont pas entrés. Le lendemain, ils se sont repliés. L’armistice est signé le 25 janvier. Les 38 jeunes de Pontmain reviennent tous sains et saufs.